We’re still the same

We're still the same

Sister Crayon – I’m still the same person

Dix ans après. La foule, un soir, les pelouses meurtries. L’orage qui n’avertit de rien et sournoisement nous guette. La vodka bien cachée, les sangs chauds, le cœur palpitations. C’est sa main dans la mienne dissimulée. L’obscurité, nos traits tirés et la tempête qui s’arme à l’intérieur. Tout autour le bruit, ombres silhouettes, masses informes compactes et l’afflux de gens qui me bousculent dans un sens et dans un autre. Ma tête tournoie, mes yeux évitent la mise au point – scrupules noyés par le grammage, les substances, et cette main, cet improbable, ta main, à laquelle je me raccroche – chaude, qui encore pour me désarmer ?

C’est le vent qui se lève, moi qui m’affaisse, c’est cette main que je désire, nos corps qui se frôlent et nos yeux pour nous trahir. C’est cette impossibilité écrite bien avant nous, ce désir aggravé. C’est cette nuit qui nous cache, la folie des gens qui protège. C’est l’excuse de la fébrilité, le prétexte de l’obscurité, c’est mon départ demain matin. C’est toutes ces années qui nous séparent, ce fossé qui nous rapproche, c’est ta main dans la mienne dissimulée. Aux regards, aux autres êtres, à nous-mêmes. C’est ta main qui tient la mienne et ton regard qui nous fuit. C’est ces basses qui tapent de plus en plus fort, la foule qui se resserre et la pluie qui dégouline. De nos visages démasqués. L’air de rien qu’on y prend et nos corps attisés qui se rapprochent à mesure que la pluie bat son plein : une frénésie. Basse, pluie, basse, pluie, je revois la chaleur qui se dégage comme nuée dans le froid puis le black out de ces dernières heures avec toi.

 

« je suis le danseur étoile, ma sœur est la ballerine, nous ne faisons plus aucun poids, nous volons en l'air, c'est une des jubilations de l'enfance de pouvoir se transformer en plume. » —Hervé Guibert

DANS LES CARNETS

à propos du silence de Larmes (largo di molto)