en orbite

groenland juin 2016

A$ap Rocky feat. Bone – Canal.St.

My mind is out in orbits,
plus my ego got endorsements
Heard the people want that raw shit,
but y’all be talkin’ bullshit

_journée (étrangement) en orbite autour du groenland aujourd’hui.
une conf call pour renseigner une structure qui a le projet là-bas de résidences et d’échanges entre designers européens et artisans locaux;
l’amie qui rentre de laponie finlandaise et passe me rendre les affaires chaudes que je lui avais prêtées (dont le fameux outdoor survival jacket censé me maintenir en vie par -40° celsius) — ses photos empreintes de magie : des rennes traversant la route et recréant parfaitement la cover d’abbey road, la nuit et la blancheur partout, les parois glacées qu’on escalade et la glissade en chiens de traîneau et en ski-doo entre forêts et lacs gelés, la magie qui se poursuit dans l’évocation de leurs rencontres animales (cette intercompréhension déstabilisante avec les chiens et les rennes d’abbey road. coïncidence ou connivence ?)*;
le message vocal laissé par une coéquipière du navire sur lequel j’ai embarqué pendant un mois et demi l’été dernier, pour des retrouvailles bientôt en terres marseillaises;
et le matin-même avant, en cherchant tout autre chose dans un disque dur, je découvre cette photo de moi sur le pont avant du bateau, prise par a. depuis la salle de bain et le carré avant où nous avions alors nos couchettes, les icebergs partout à l’horizon — et moi tentant de regarder avec beaucoup d’attention je ne sais quoi (les bras ainsi posés sur les hanches pour le dire).

_toutes ces évocations et les destinations froides que j’ai enchaînées depuis mon retour du vietnam fin 2014 me glacent les sangs. envie de canicule. de rosé. de sable et de sel à retrouver par terre chez moi à balayer. dehors, depuis le matin, une pluie fine mais drue ne cesse de tomber.

_beauté du soir trouvée dans cette pluie drue face mer (personne ici pour s’aventurer au dehors par un temps pareil, on hiberne, on couette, on musique, on film, on lecture, on écrit). tentatives de trouver calme et beauté ici et là et là mais le moral dans les chaussettes dès que le cerveau se remet en marche (c’est-à-dire dès qu’il rouvre les vannes sur le monde extérieur ; c’est à ce point-là oui). passée une bonne partie de la nuit d’hier à lire tous les papiers de sans a. dont je trouve le boulot formidable. failli même leur envoyer un mot pour leur proposer mon aide – mais le clair manque de temps pour rajouter un énième projet bénévole à mes activités. en même temps c’est formidablement déprimant aussi. je pense retourner en compagnie de becky walters, criquette et brad montgomery ce soir, meilleur anxiolytique de tous les temps.

 

* relire à ce sujet le magnifique Versant animal de Jean-Christophe Bailly.

 

* * *

_extrait du carnet de notes de là-haut, daté du jour où la photo a été prise :
Mardi 30 juin. Incroyable lever à 12h40, il fait gris. Nous sommes toujours dans la petite baie à l’embouchure nord du fjord de kangerlussuaq. Après le petit-déjeuner, nous partons, Anthony, Pascale, la nouvelle Cécile et moi « à la chasse aux œufs d’eiders » sur la baie d’en face de notre mouillage. Pascale et moi nous disons que si nous trouvions un nid, nous n’oserions enlever un œuf à sa maman, et ne cherchons pas vraiment les nids. Du vent en pagaille sur quelques crêtes, temps normand, lorsque le vent tombe, les températures sont douces. Je rejoins Anthony qui a trouvé des moules en lisière de l’eau, on en ramasse deux bons gros sacs pendant une bonne heure jusqu’à ce que l’annexe vienne nous récupérer. Phil prépare en deux temps trois mouvements une paëlla tandis que je pêche une morue (la seule du jour) à la palangrotte. Après le déjeuner (à 17h30), je me remets à la pêche sans succès mais y passe du temps, calme et serein jusqu’à ce que les moustiques m’incitent à faire une pause. Je reprends de 20h à 21h. Une seule morue mord et se libère. Toujours calme et serein. Je regarde Roseaux Sauvages de Téchiné et après diner, commence Les Témoins et cela m’oppresse tant que je ne trouve plus le sommeil, la batterie de l’ordinateur à plat, j’embraye sur l’ipod pour calmer un peu mon cœur.

par Candice Nguyen

« je suis le danseur étoile, ma sœur est la ballerine, nous ne faisons plus aucun poids, nous volons en l'air, c'est une des jubilations de l'enfance de pouvoir se transformer en plume. » —Hervé Guibert

DANS LES CARNETS

à propos du silence de Larmes (largo di molto)